J'entend le gang qui arrive

Oublie tes baskets, il faut partir. Nous allons ailleurs, dans un endroit meilleur. Meilleur qu'ici en tout cas. Moi non plus je veux pas partir, m'en aller. Tu sais j'y ai tous mes souvenirs depuis que je suis née. Je ne te parle pas de meubles, ni de jardin, ni de photos, ni pièce, ni livres. Ce n'est pas matériel. Pas vraiment. Le fait de changer de vie, comme ça. Dans le vif et l'instant d'après, nous sommes déjà partie. Peut être que nous aurons le temps de nous retourner une dernière fois avant de ne plus la voir. Tu la reverras, un peu moins précise, un peu moins détaillée. L'odeur, le parfum, tu le perdras définitivement, tu penseras que c'était celui ci. Mais tu te tromperas. Tu penseras le reconnaître, mais tu te tromperas également. Dans tes souvenirs, elle sera beaucoup plus grande, beaucoup plus spacieuse. Elle restera à la mode, restera saine. Les motifs seront toujours aussi beaux que maintenant. Tout te semblera dans ta mémoire, plus beaux, plus que tout. Or, quand tu y retourneras, ton petit monde sera complètement changer. La poussière, la dégradation, la nature, le temps y aura pris possession des lieux. Il t'embrouillera l'esprit. Tu penseras reconnaître la moindre petite chose. Les choses auront changer. Mais tu vois, l'heure n'est plus au grand discours. Nous devons partir. Je préfère que tu y laisses tes souvenirs, plutôt que tu y laisses ta propre vie. Je sais que c'est difficile. Je sais qu'il est tard. Je sais que tu es triste. Je sais à quel point cela fait mal. Mais le vent va tourner. Il sera trop tard.